L’autre matin, un éditorialiste de “gauche” pérorait sur France-Culture pour expliquer doctement à son interlocuteur (et accessoirement à l’auditeur inculte que je suis) qu’il ne fallait pas mélanger réfugiés et migrants économiques. Les premiers ayant un droit “légitime” à venir demander l’asile en Europe et les seconds n’étant que des personnes (imprégnées sans doute d’esprit libéral cher à ce chroniqueur…) qui pensent juste que leur situation matérielle sera meilleure s’ils viennent vivre par ici…
Ce à quoi l’invité (Laurent Giovannoni du Secours catholique) essayait de répondre sans trop s’énerver, même si l’on sentait bien qu’il avait bien envie d’envoyer le libéral de gauche faire un tour dans ces pays tellement agréables qu’on se demande bien pourquoi leurs habitants veulent en partir. Comme le Soudan, dont seraient originaires 40% des réfugiés de Calais, et qui n’est pas vraiment un pays de cocagne.
Mardi 1er mars justement, une trentaine de confrères soudanais de l’éditorialiste tellement culturel ont entamé une grève de la faim pour protester contre la fermeture de leur journal, El Tayar, depuis 3 mois déjà par le gouvernement soudanais. Le rédacteur en chef du journal, Osman Marghani, risquant même la peine de mort pour avoir “encouragé un printemps arabe” dans le pays.
On ne rigole pas avec la liberté de la presse dans le doux pays dirigé d’Omar al-Bashir.
Bâillonnés et les mains enchainées, les journalistes ont fait savoir qu’au delà de la réouverture de leur journal, ils voulaient défendre la liberté d’expression et de la presse au Soudan, classé en la matière 174e (sur 180 pays) par le dernier rapport de Reporters sans frontières. Et qu’il espéraient que l’exemple de leur combat incite à d’autres manifestations de protestation pacifique dans le pays.
“Ce mouvement doit être soutenu et aider à réaliser quelque chose de positif”, a ajouté l’un de leurs confrères venu les soutenir.
Dans le genre soutien positif, je suggère à certains de se mettre eux aussi du scotch sur la bouche. Ça nous mettrait au moins en vacances de l’idéologie libérale de gauche.
(photos : Ashraf Shazly, Ahmed Saeed Ahmed, DR)
Si la presse est muselé, la musique garde quelques libertés.
Comme en témoigne cette jam session enregistrée à Khartoum il ya quelques mois, par l’accordéoniste Ila Moss venu rencontrer les musiciens locaux dans un club de la ville.
Et pendant ce temps là, les iraniens de Calais qui, eux, ne savent plus comment le dire, se cousent les lèvres…
http://www.liberation.fr/direct/element/des-iraniens-se-cousent-une-nouvelle-fois-les-levres_31971/