“Mon pays c’est ici ou là-bas pourvu que tu y sois.”
Souad Filal
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Même si je m’affirme comme Citoyen du Monde, je suis né en France. Et demeure Français.
Et si je m’écarte aujourd’hui de la ligne (sinueuse, je sais) de ce blougui en vous proposant une – longue – série de photographies de mon pays, c’est qu’en voyant ces images j’ai pensé qu’elles auraient pu venir de … là-bas.
De ces pays d’ailleurs, où les Droits de l’Homme sont autant bafoués que les existences de milliers de femmes, d’hommes et d’enfants qui ne cherchent qu’un refuge contre la guerre, la faim, la pauvreté, le manque de tellement d’essentiels. Qui ne cherchent que la vie. De ces pays d’incertitude, de précarité, de misère, de détresse, où trop de camps de fortunes dépassent le provisoire sans jamais atteindre la dignité. De ces pays où vivre en étranger ou en déplacé de l’intérieur se résume trop souvent à survivre.
Mais les photos du jour ont été prises hier matin, aux portes de Paris, où un campement d'(in)fortune a été évacué par les forces de l’ordre, dès 4h15 du matin. Ce qui nous donne ces images nocturnes où alternent le bleu des sirènes et le rouge des brasiers qui se sont alors allumés.
Une évacuation de 2000 ou 3000 exilés, sans-papiers, réfugiés, migrants. Innommables intouchables de notre pays civilisé. Un démantèlement comme il y en a déjà eu des dizaines d’autres depuis 5 ans, comme le rappelle cet article (un parmi tant d’autres que je n’ai pas tous lus…)
Une opération policière, tentant de maintenir les journalistes à l’écart, au pied du Stade de France, où le match de football du soir se déroulera – lui aussi – à huis-clos.
Une opération de communication aussi, notre ministre de L’Intérieur se félicitant de “la mise à l’abri” des habitants du camp dont un millier n’ont pu que s’exiler encore plus loin.
Et ce triste billet, pour simplement ne pas dire que je n’ai rien vu et juste avouer que je ne sais quoi faire. Sauf témoigner. M’indigner. Évoquer la honte de ce pays qui est le mien, l’un des plus riches du monde et tellement fier d’être la “patrie des Droits de l’Homme” qu’on ne sait plus trop bien le sens de ce slogan dérisoire.
Hier soir, plus tard, dans les rues de Paris, il y avait plusieurs milliers de manifestants pour différentes causes : fêter les 2 ans des gilets jaunes, dénoncer l’absurdité des JO, protester contre la loi de programmation de la recherche ou celle sur la sécurité globale…
Parmi les manifestants, certain rappelait que la France est le pays des Droits de l’Homme.
Ah bon ?
(Photos : Julien Mattia et Lionel Bonaventure)
Ah oui, la musique !
J’ai (enfin) terminé hier soir la lecture d’Apeirogon, de Colum McCann, qui évoque de si belle manière ce pays déchiré entre Israël et Palestine, avec cependant tellement d’espoir que se répare un jour cette déchirure. Grâce à quelques hommes et femmes de bonne volonté.
Et je vous parle de ce livre pas seulement à cause de sa beauté et de mon émotion à sa lecture, mais aussi parce que c’est à travers ces pages que j’ai découvert ce morceau étonnant de John Cage (1912-1992) intitulé 4’33 »
Je vous laisse le découvrir à votre tour, dans une interprétation de l’EBU Euroradio Orchestra, donnée à l’occasion du centenaire du compositeur.
Alors.. quelle performance !!