“Cauchemar, mauvais sort
Et c’est pour ça que tu me vois dans l’bar
C’est pour ça qu’à cet heure je bois du fort
Cauchemar”
Robert Charlebois, Cauchemar
*
En me réveillant ce matin, j’étais assez content d’avoir passé une nuit – presque – normale, sans m’endormir après 3 heures du matin, avec en prime deux rêves sympathiques et souriants : dans le premier je lâchais (enfin) toutes les insultes qu’il mérite à … (je vous dirai qui quand il sera temps) ; dans le second je serrai dans mes bras une jeune femme (inconnue), sans masque, sans distance, avec un grand sourire de soulagement.
Et pouf, voilà qu’au réveil, en prenant mon café, je vais regarder les images de l’actualité planétaire et je tombe sur la photographie du jour.
Pauvre gosse !
Il faut dire que ma sensibilité à l’enfance s’est largement accru depuis 3 semaines que je suis grand-père. Mais de voir cette gosse à plat ventre devant ces forces du désordre indifférentes à son sort, ça m’a atterré.
Je pense – j’ose espérer – que, dans les minutes qui ont suivi la prise de vue, la mère, le père, la grande sœur ou le grand frère ou n’importe qui est venu ramasser cette gosse, la rassurer, la câliner, l’emporter plus loin, à l’abri.
Mais où ? Où aller quand on n’a plus d’abri ?
Car cette image illustre une sinistre information : celle de l’évacuation dans campement “illégal”, à Renca, dans la banlieue de Santiago du Chili.
J’ai été immédiatement vérifier si ce n’était pas “El sueno de todos” (Le Rêve de tous) dont j’ai parlé ici en novembre dernier qui avait été ainsi détruit. Mais ce dernier se trouve dans le sud de la capitale et Renca plutôt au nord. Le Rêve est – peut être – toujours vivant. Maigre consolation.
C’est donc mercredi dernier que plus de 300 policiers sont venus évacuer ce campement illégal, à coups de gaz lacrymogènes et de canons à eau, suivis par des bulldozers chargés de remettre le terrain en état. Les articles que j’ai consultés ne me disent pas combien de personnes ont dû fuir, juste que 5 ont été arrêtées, ni où elles ont pu aller, à part un “individu” qui a confié au journaliste qu’il allait devoir “aller vivre sous un pont”.
Selon le directeur de la Fondation Techo, qui œuvre pour “une ville juste et soutenable”, il manque au Chili de 500 à 600.000 logements.
Une broutille…
Je sais que je suis parfois d’une naïveté attristante, doublé d’un humanisme dégoulinant, mais quand même, je me demande s’il ne serait pas plus intelligent de payer plus de maçons et moins de policiers (ou de gendarmes ou de militaires).
Et ne nous rassurons pas en nous disant que le Chili c’est loin. Dans la métropole lyonnaise où j’habite (encore), le prix des logements flambe, des quartiers se vident et plus de 3000 personnes (au moins) sont à la rue. Et demain, au Carnaval Libert’air (13 heures) comme au rassemblement contre la loi “Sécurité globale” (14 heures) on risque de compter autant de flics que de participants.
(Photo : Ivan Alvarado)
Dans la série cauchemar en image, j’ai aussi croisé ça : Hannah (sic et snif) Boulder, sergente de la garde nationale en plein récital au Capitole. Une vision d’avenir des concerts qui nous resteront ?
(Photo : Erin Scott)
Rassurez-vous : je n’ai pas cherché la vidéo correspondante.
C’était en 1973 que Charlebois soignait ses cauchemars dans les bars (ce qui nous manque bien aussi). Mais j’ignorais jusqu’à ce matin, que sa carrière avait commencé bien avant.
Un document de … 1965.